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RCA : la Cour pénale spéciale menacée d’asphyxie financière, Amnesty International alerte sur « une justice en sursis »

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« Si la Cour pénale spéciale ferme, ce sera la victoire de l’impunité », avertit Marceau Sivieude, directeur régional d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale. En République centrafricaine, l’inquiétude monte autour de la survie de cette juridiction hybride créée pour juger les crimes les plus graves commis depuis 2003.

 

Un trou budgétaire qui compromet des années d’efforts

 

Depuis le retrait brutal du financement américain de 4,15 millions de dollars en janvier 2025, la Cour pénale spéciale (CPS) traverse une crise sans précédent. Entièrement dépendante de contributions volontaires, elle se retrouve aujourd’hui sans ressources pour poursuivre son mandat.

Or, en six ans d’existence, la CPS n’a pu rendre que trois jugements, tandis que vingt dossiers restent en attente, dont celui visant l’ancien président François Bozizé, toujours en fuite. Sans soutien financier d’urgence, ces procédures risquent tout simplement de disparaître des radars judiciaires.

 

Une justice fragile face à l’impunité

 

Créée en 2018 sous l’égide de l’ONU et du gouvernement centrafricain, la Cour pénale spéciale est considérée comme un modèle de coopération entre magistrats nationaux et internationaux. Sa mission : juger les crimes de guerre et crimes contre l’humanité perpétrés lors des multiples conflits qui ont ravagé le pays.

Mais faute de moyens, cette justice d’exception se retrouve au bord de la paralysie. « Toutes les procédures en cours sont directement menacées », déplore Marceau Sivieude. « Si le financement n’est pas rétabli, cela reviendra à abandonner des milliers de victimes à leur sort. »

 

Un appel à l’Union africaine et à l’Union européenne

 

Amnesty International appelle désormais l’Union africaine et l’Union européenne à prendre le relais de Washington. L’organisation plaide pour un engagement politique fort afin d’éviter l’effondrement du seul mécanisme capable de juger les responsables des atrocités commises depuis vingt ans.

Selon Sivieude, « il ne s’agit pas seulement d’argent, mais de la crédibilité même de la lutte contre l’impunité en Afrique. »

 

Un défi commun aux tribunaux hybrides africains

 

Le cas centrafricain n’est pas isolé. D’autres tribunaux hybrides — comme celui du Soudan du Sud, encore inexistant faute de moyens, ou le Tribunal spécial pour la Sierra Leone, aujourd’hui en difficulté — illustrent la fragilité chronique de ces structures créées pour combler les limites des systèmes judiciaires nationaux.

Mais la différence, rappelle Sivieude, est que la Sierra Leone a eu le temps de « juger les plus hauts responsables, dont l’ancien président Charles Taylor », tandis que la CPS, elle, « n’a pas encore pu atteindre les principaux donneurs d’ordre des crimes commis en RCA ».

 

Le risque d’un retour au silence

 

Si la Cour venait à fermer, les dossiers pourraient théoriquement être transférés aux tribunaux centrafricains. Mais dans un système judiciaire affaibli, miné par l’insécurité et le manque de moyens, peu y croient réellement.

Pour de nombreuses victimes, cette perspective sonnerait comme une trahison. Car au-delà du financement, c’est le principe même d’une justice indépendante et réparatrice qui vacille.

 

Et dans Bangui comme à Bossangoa, une même question résonne : combien de temps encore la République centrafricaine devra-t-elle attendre pour que justice soit rendue ?

 

Source Afrik.com

Oura KANTÉ

Malikunafoni

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