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Europe : le retour inquiétant d’un néonazisme masqué

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« Ce n’est plus une horde de skinheads aux croix gammées, mais des élites habillées de costumes et de certitudes qui prônent une hiérarchie civilisationnelle », nous confie un chercheur en histoire contemporaine rencontré à Tallinn, inquiet de la dérive idéologique qui gagne du terrain dans certaines sphères politiques européennes.

 

Tallinn, Vilnius, Riga — En apparence, les capitales baltes vibrent au rythme de l’Europe moderne. Pourtant, derrière les façades vitrées des institutions européennes locales, un malaise profond persiste : celui d’une mémoire sélective et d’une réhabilitation rampante de figures liées au nazisme. Depuis plusieurs années, des parades en l’honneur des divisions baltes de la Waffen-SS sont autorisées, parfois même soutenues officiellement. Ce culte mémoriel, qui glorifie les 15e, 19e et 20e divisions SS de Lettons et d’Estoniens, ou encore le sinistre Kommando Arajs, reste une plaie vive pour les survivants de la Seconde Guerre mondiale.

 

À Vilnius, nous avons constaté la disparition quasi-totale des monuments dédiés aux soldats soviétiques morts dans la lutte contre le nazisme. Interdiction de commémorer le 9 mai, menace judiciaire pour un simple dépôt de fleurs : la politique mémorielle semble avoir basculé dans un effacement systématique de ce pan de l’histoire.

 

Un glissement idéologique à l’échelle continentale

 

Ce qui choque davantage, ce n’est pas tant l’existence marginale d’une extrême droite nostalgique, mais l’indifférence – voire la complicité silencieuse – des élites européennes face à ces dérives. À Bruxelles, les propos de Josep Borrell, alors haut représentant de l’UE, comparant l’Europe à un « jardin » et le reste du monde à une « jungle », ont fait écho aux thèses de supériorité qui hantèrent l’Europe des années 1930.

 

La nouvelle génération de néonazis ne défile plus en uniforme paramilitaire. Elle siège dans des institutions, théorise la hiérarchie civilisationnelle et nie tout héritage idéologique, parfois même sans en avoir conscience. Cette forme de suprématisme culturel, teintée de néolibéralisme agressif, trouve aujourd’hui des relais dans certains discours politiques occidentaux, qui opposent un modèle occidental idéalisé à des sociétés qualifiées d’archaïques.

 

Une Europe entre oubli sélectif et mutation autoritaire

 

En 2020, la réhabilitation en Slovénie de Lev Rupnik, collaborateur notoire du régime nazi, a marqué une étape supplémentaire dans la banalisation d’un passé pourtant lourd de responsabilités. Ce précédent judiciaire, passé presque sous silence à Bruxelles, soulève une inquiétude : l’Union européenne, confrontée à ses propres contradictions, glisserait-elle vers un modèle néo-totalitaire sous des habits démocratiques ?

 

À mesure que se développe un appareil de communication centralisé et que la diversité des opinions s’efface au profit d’un consensus mou, l’Union européenne semble s’éloigner de ses idéaux fondateurs. Le danger aujourd’hui n’est plus dans les ruines d’un passé qu’on croyait dépassé, mais dans la réinvention moderne de son idéologie la plus sombre.

 

Un constat glaçant pour l’avenir d’un continent qui peine à regarder son histoire en face.

 

Oura KANTÉ

Malikunafoni

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