Bateau Mali : Attention à des risques de chavirement, averti l’analyste Dionké Fofana
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Bateau Mali : Attention à des risques de chavirement, averti l’analyste Dionké Fofana

L'esseulement insistant du capitaine fait peser sur le navire Mali, un risque pressant de chavirement

Je prête ma plume, sollicite l'oreille du grand taciturne, et exige de lui qu'il sorte urgemment de son silence assourdissant pour trancher et rassurer les maliens !  Le blanc-seing arrive à échéance et les mêmes causes risquent de produire les mêmes effets.

Le Mali va mal, les résultats tardent, les services sociaux de base se périclitent inexorablement, les acquis démocratiques se dégringolent face aux manœuvres dolosives de la baïonnette en connivence avec l’épitoge et la toge.  Les soutiens d’hier se transforment en des éreinteurs aujourd’hui.  La propagande a atteint son paroxysme et commence à s'effriter aux tribulations du peuple. Le peuple s'interroge et susurre d'inquiétudes, il a soif de changement, s'impatiente et ne tardera pas à en réclamer avec acuité et impétuosité.

Tout le peuple, sans coup férir, observe la démultiplication des foyers de tensions tant exogènes qu’endogènes. Le bateau prend de l'eau de toute part, et à chaque jour suffit sa peine et lui rapproche inéluctablement du précipice.

Bref, l'exacerbation des tensions multiformes ne pourra céder à la tergiversation, à l'hésitation, ou à la gestion aléatoire du pouvoir.

Les options stratégiques prises ont certainement produit des effets sur le plan militaire, mais elles sont visiblement éprouvées sur le plan économique, politique, social, du développement et de la diplomatie.

Vu l'état de la nation et le risque de soulèvement populaire qui plane sur le pays, le chef de l'État doit prendre des décisions audacieuses et des mesures fortes. Les Maliens ne peuvent plus attendre, un changement de paradigme s'impose.

Dès à présent, le Président de la transition doit, promptement et avec d’extrême urgence, prendre 3 mesures parmi tant d’autres :

1.  Dissoudre le gouvernement et procéder à un nouvel attelage avec un nouveau premier ministre technocrate aux compétences avérées et qui aura comme missions essentielles entre autres ;  la réintégration urgente du Mali dans le concert des nations, la levée des fonds sur le marché financier international pour combler le déficit budgétaire et répondre à la demande sociale, et enfin l'organisation d'élections libres et transparentes dans les délais raisonnables n'excédant pas le 31 Décembre 2024. Il est clair que beaucoup de pensionnaires des ministères régaliens ne doivent plus y figurer compte tenu des postures clivant et va-t-en-guerre bien souvent adoptées ces dernières années.

Le gouvernement actuel est à saluer à bien des égards pour avoir fait ce qu’il peut, avec certes des résultats mitigés, mais force est de constater qu’il n’est plus qualifié pour redresser et engager le pays sur la voie du progrès et du développement.

Le nouveau gouvernement doit être resserré avec maximum 10 à 15 ministres qui auront un cahier de charges clair avec des objectifs atteignables et mesurables.

2.  Répondre aux besoins urgents des maliens en adoptant des mesures favorisant l'accès universel aux services essentiels de base. Pour y parvenir le Président doit imposer, entre autres:

■ La réduction du train de vie de l'État à travers la rétrocession au trésor public du supplément budgétaire accordé en 2024 à la Présidence, à la primature et au CNT; la réduction symbolique et conjoncturelle des salaires des hauts fonctionnaires ou représentants de l'État (Président, ministres, membres des institutions, diplomates ou fonctionnaires internationaux...); le renoncement à la caisse noire de la présidence, de la primature et du CNT pour cette année 2024...

■ Mise en place de mécanisme domestique de financements innovants comme entre autres : l'élargissement ponctuel et conjoncturel de l'assiette budgétaire par la création de nouvelles taxes sur les produits importés, sur les billets d'avion, sur les soda et boissons alcoolisées, sur les jeux de hasard (PMU...), sur les grandes distributions et acteurs économiques majeurs. Un mécanisme de gestion, de suivi et de supervision sera mis en place à cet effet.

■ Le rééquilibrage budgétaire à travers la rectification de la loi de finances 2024. Le Mali doit ralentir la course aux armements au profit du financement des secteurs sociaux et du développement. L’arsenal militaire actuel du Mali le place parmi les armées africaines les plus équipées. Le budget cumulé 2024 du Ministère de la défense, du ministère de la sécurité, et de l’agence nationale de la sécurité d’Etat, envoisine 700 milliards, l’équivalent d’un peu moins du tiers du budget national 2024 estimé 3 071 milliards. (source loi de finances 2024). L’économie de guerre doit faire de la place à l’économie de développement.

Pour contenir urgemment la grogne sociale en gestation, les recettes provenant des dites mesures financeront prioritairement :

● les 500 millions de litres de carburant estimés à 309 milliards de Fcfa pour assurer la fourniture en continu de l'électricité en 2024, en attendant la mise en place des politiques structurelles et structurantes. L’État du Mali est le premier mauvais payeur, donc le premier mauvais client de l’EDM, et à  cet effet il doit urgemment s’obliger une discipline Budgétaire.

● la subvention des produits de grande consommation et de premières nécessités comme les céréales, le sucre, l’huile, l’aliment bétail… en partenariat avec la CCIM (Chambre de Commerce et d’Industrie), et le CNPM (Conseil National du Patronat du Mali).

● la subvention des déficits des centres hospitaliers qui n’arrivent plus à offrir des services de santé de qualité et à moindre coût aux populations. Les hôpitaux manquent de tout y compris des ordonnanciers pour les prescriptions médicales. Le business et la surenchère prirent d’assaut les hôpitaux, rendant aléatoire l’accès aux soins. Le Président de la transition peut et doit s’inspirer de l’exemple du Burkina Faso qui vient d’octroyer une baisse drastique sur les examens d’imagerie médicale. Une initiative fortement saluée par le peuple du Burkina Faso. Il faut également accélérer l'élargissement de la base du RAMU (régime d'assurance maladie universelle).

3.  Mise en place d'une nouvelle ligne en matière de diplomatie et de coopération internationale y compris économique.

Aucun pays ne pourra prospérer dans l’autarcie et ne saura se réaliser en vase clos, le Mali doit urgemment renouer avec tous les pays du voisinage et reprendre les échanges pour les ressources stratégiques comme l'énergie avec la RCI, le Sénégal et la Mauritanie.

Le Mali doit reprendre incessamment des relations décomplexées avec toutes les organisations internationales, avec les PTF, avec le système financier international, avec les institutions de Bretton Woods, avec l'ensemble de la communauté internationale basées sur du Win Win (gagnant - gagnant).

Le Mali doit garder sa ligne de construction de la nouvelle alliance des Etats du Sahel, tout en se positionnant comme interlocuteur crédible pour que la nouvelle alliance prospère dans un espace communautaire régional, stable et refondé répondant aux aspirations des peuples du sous-continent Ouest Africain…

Pour la réalisation de cette nouvelle orientation, les forces vives doivent s’obliger une trêve sociale et accompagner la fin heureuse de la transition au seul bénéfice du peuple du Mali.

Ceci est une contribution pour servir le débat, et atteindre le destinataire in fine et valoir ce que de droit.

Dionké Fofana, analyste en Sciences Politiques, Sociales et Économiques

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