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Leadership féminin à Ségou : l’état des lieux à Sébougou


Dans la région de Ségou, les femmes représentent 49,7% de la population totale estimée à 3.256.448 habitants selon le cinquième recensementgénéral de la population et de l’habitat réalisé par l’INSTAT en 2022. ÀSébougou,67% de la population n’ont aucun niveau d’instruction scolaire et 61,8% sont des femmes selon les résultats du 1erpassage de l’EMOP, janvier-mars 2023, une enquête de l’Institut national de la statistique.

Dans la ville de Ségou singulièrement à Sébougou, les inégalités entre l’homme et la femme sont évidentes: les revenus anormalement répartis, la gestion des revenus revient aux hommes alors que les hommes et femmes se retrouvent dans toutes les activités avec presque les mêmes niveaux de participation.

Les femmes de Sébougou sont à la recherche permanente de financement pour soutenir leurs activités constituant pour elles une source sûre de revenus. Mais, malheureusement, quand un partenaire technique et financier décide de s'engager avec les femmes et leurs structures, ce sont les hommes qui sont au-devant de la scène.

M. Moussa Kané, le chef de village de Sébougou, ne semble pas s’accorder avec le leadership féminin dans sa communauté: « un chef est choisi en fonction de sa moralité, de son instruction. Son rôle est d'être à l'écoute, gérer les conflits et repérer les personnes endifficulté. C'est pourquoi il doit être entouré que par des hommes car les femmes sont beaucoup trop susceptibles et influençables.

Dans nos coutumes et mœurs, les femmes doivent toujours passer en seconde position. Oui, les femmes travaillent avec les partenaires techniques et financiersmais jamais sans un intermédiaire qui est un homme. Chez nous, un partenaire a soudainement mis fin à un projet parce que j'ai décidé avec mes conseillers de donner la gestion des ressources à un homme. Une femme ne devrait pas présider tant qu'il y a des hommes valides ».

À en croire Kadiatou Dembélé,les conditions de vie des femmes de sa localité nesont pas meilleures que celles des autres localités du Mali. « Pour surmonter toutes nos difficultés financières, nous sommes pour la plupart organisées en coopérative. Au sein de ces structures, nous bénéficions de certaines aides de la part des partenaires pour financer certaines de nos activités. Mais hélas, ce sont les hommes qui en profitent car ce sont eux qui gèrent le côté financier. Les hommes disent qu’ils sont les chefs de famille et que les charges leur reviennent. Nous ne pouvons pas aussi contester sous peine d'être exclues du groupement en question. Mais malgré tout, nous avons l'espoir d'un avenir meilleur car nous sommes déterminées à sortir du silence et être aussi au-devant de la scène »explique-t-elle.

Nana Diallo, ménagère, raconte: « Nous les femmes de Sébougou sommes confrontées à plusieurs défis liés à l'emploi et à la représentation politique. C'est pourquoi, l'ONU Femmes a initié un programme de formation en leadership auquel nous avons participé, et à des tables rondes sur l'autonomisation des femmes. Nous avons eu à discuter des sujets tels que les qualités qui font un bon leader, comment promouvoir le changement dans nos communautés; changer les normes sociales et du genre qui impactent mal nos vies. J'ai appris tant de nouvelles choses, grâce à ceprogramme, cela m'a vraiment aidée à me développer en tant que membre active de ma communauté. Aussi, je pense que toutes les femmes rurales devraient en bénéficier car ça m'a redonné confiance. »

De son côté, Mme MaïmounaDoumbia, veuve et mère de six (6) enfants, s’interroge ainsi : « comment les femmes peuvent-elles contribuer à produire pour nourrir la société et leur famille si les terres sont des ressources qui peuvent leur échapper à tout moment? La femme a un accès très limité à la terre et aux ressources forestières car culturellement elle n'a pas droit à l'héritage. Et c'est là que se pose le problème de la propriété… ».

Pour favoriser l’autonomisation des femmes et encourager leur leadership, la veuve MaïmounaDoumbia interpelle les autres femmes à se regrouper en association ou coopérative pour qu'aucune femme ne travaille en solo car, pour elle, l'union fait la force. « Faire partie d'une coopérative aide à surmonter les obstacles qui freinent la femme rurale dans ses efforts pour le développement » estime-t-elle.

Pour Ousmane Oulalé, membre de l'ONG ASAC (Association de Soutien à l'Auto-proclamation des Communautés), les femmes rurales sont le plus souvent confrontées à un accès insuffisant aux ressources, aux services et à l'information, la lourde charge que représentent les soins non rémunérés et le travail domestique. Aussi, les normes sociales traditionnelles et discriminatoires persistent.

De ce fait, la collaboration de l’ONG ASAC avec les femmes n'a pas été de tout repos. « On avait un petite mésentente avec la chefferie. Notre mission est d’aider ces femmes rurales, d’assurer leurs moyens de subsistance et à faire valoir leurs droits. Dans chaque village de Sébougou, on a essayé d'identifier et de former des femmes modèles et influentes pour qu'elles puissent être capables de peser dans les échanges aux niveaux communal et communautaire », affirme Ousmane Oulalé.

Mariam Koné, travaille à la Mairie de Sébougou, explique qu’à Sébougou ou presque partout en zone rurale, les petites agricultrices, entrepreneuses ou travailleuses agricoles sont victimes de multiples discriminations sexistes en accédant au savoir et à la formation ou encore aux services financiers et à l'innovation technologique.

« C'est pour toutes ces raisons qu'on a mis en place un programme appelé Accélérer le progrès vers l'autonomisation des femmes pour faciliter nos collaborations avec ces groupements de femmes qui sont sous-estimées et toujours mises de côté. Au début, ça n'a pas été facile avec la chefferie mais on a eu à tenir plusieurs séances de sensibilisation pour pouvoir travailler et aider ces femmes à être autonomes, qu'elles aient une voix au sein de leur famille tout comme dans la sphère publique notamment en étant représentées dans les organes de décision », affirme-t-elle.

Selon Moussa Zongo, pêcheur,« c'est vrai que je n'ai jamais été à l'école mais je crois fermement que les hommes et les femmes ont les mêmes droits et qu'elles doivent s’émanciper. Elles sont sources de bonheur donc elles méritent ce qu'il ya de mieux. De ce fait, il s'agit notamment d'assurer l'égalité d'accès des filles à l'instruction; à la remise en question des stéréotypes et des normes sociales qui limitent l'égalité des droits et des chances des filles ».

YoumaSagara est agricultrice à Sébougou et mère de quatre enfants. Elle a appris à faire valoir ses droits et à se défendre. Selon elle, une vie digne et une paix durable passent par l'équité et l'égalité entre les femmes et les hommes. Ses engagements remontent à de nombreuses années, en ce qu'elle a toujours milité pour une amélioration significative des conditions de vie des femmes rurales de sa commune.

Au fil des années, son travail a pris de l'ampleur, elle est devenue un modèle de persévérance et une référence en matière d'actions pour l'émancipation des femmes à Sébougou. « Je veux contribuer à la reconnaissance des femmes agricultrices et à leur affirmation en tant qu'actrices politiques et bâtisseuses de paix sur le territoire. Je suis convaincue que nous avons toute la capacité de participer aux décisions régionales et nationales », confie-t-elle.

Source : Le Reporter par Lalia SISSOKO

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